PROFANATION : LE CONTEXTE et les motivations
C’est dans le contexte général de la destruction - décidée par le conseil municipal - du Calvaire-Ossuaire comme entité globale délibérément construite en 1862 et n’ayant pas préalablement fait l’objet d’un inventaire contradictoire débouchant sur un mémoire autour duquel aurait pu se faire un compromis sur l’évolution éventuelle du site. Ce mémoire qui aurait pu trouver très aisément l’essentiel de son contenu initial dans les registres municipaux et paroissiaux, différents documents privés et la transmission orale sur des événements somme toute récents puisque datant de la deuxième moitié du XIXème siècle soit 5 ou 6 générations.
Mais présentement notre plainte, dont les seules motivations éthiques et anthropologiques doivent être retenues même si l’enquête risque de faire apparaître un certain nombre de manquements à la loi, ne porte que sur des faits de destruction de l’ossuaire de Romagnat, qui se sont déroulés le 2 novembre de 8 heures le matin à 17 heures l’après-midi et dont la manière dont ça s’est déroulé nous ont persuadé qu’étaient perpétrés ainsi des actes profanatoires contraires aux fondements anthropologiques de l’espèce humaine, et à l’éthique de sa civilisation et selon toute vraisemblance à la loi elle-même. On le verra plus avant le fait qu’ait été retenue la date du 2 novembre jour des morts pour l’exécution de ces travaux constitue pour nous un élément aggravant voire même déjà un facteur profanatoire dans un pays de tradition chrétienne. Qu’on avance l’exigence du calendrier des travaux pour le justifier (Journal INFO) est pour nous à plusieurs égards irrecevable comme on le verra par la suite.
La purge « inavouée » de l’ossuaire constituait la dernière phase de la destruction du calvaire-ossuaire avant la livraison par la municipalité du terrain nu au promoteur Logidôme comme convenu dans la vente de cette parcelle. L’opération consistait donc à retrouver le terrain naturel sur lequel en 1862 avait été édifié selon une pratique religieuse très ancienne sur les sépultures ou assimilées un tertre avec des matériaux provenant de l’ancien cimetière qui était à proximité et dont le caractère sacré interdisait qu‘ils soient versés dans une décharge ou servent de remblais et dont la quantité très importante empêchait qu’ils aillent « encombrer le nouveau cimetière » qui malgré tout en accueilli une partie. Ces matériaux étaient constitués d’ossements en très grande quantité – allant des os entiers à des esquilles et de la poussière d’os – et du substrat terreux qui leur était associé. Au préalable l’ensemble avait été passé à la claire pour en éliminer les éléments les plus terreux et réduire ainsi le volume …et c’est ainsi que plus de 350 m3 furent transportés rue de la treille pour figurer « la montagne sacrée » sur laquelle on érigea la croix puis qu’on entoura d’un enclos quadrilatère pour bien souligner le caractère sacré. (Sources : délibération du conseil municipal du 6/10/2010 ; chronique de Jean Cohendy, livre ouvert de l’église, courrier de l’archevêché et divers …)
Malgré ça et peut-être dû à la seule initiative de l’entreprise Geneste responsable des travaux de démembrement du calvaire et habituée aux travaux en contexte historique, deux petites fouilles « (60X60X40) furent réalisées en ouverture du chantier le lundi 13 septembre (Jour d’ouverture de la semaine précédent le week-end des Journées du Patrimoine ?). Elles ramenèrent immédiatement et inévitablement outre le « chapeau en fer forgé » de l’ancienne croix, des ossements qui à la demande de la Mairie (jusque là plus que réservée) furent identifiés par l’entreprise de pompes funèbres Dabrigeon (dont la mission s’arrêtait à ça) comme des restes humains et … non animaux (?!). Alors que suite à ça une exploration plus complète du tertre par sondage successifs s’imposait pour prendre la mesure du problème et trouver une réponse adaptée et réellement respectueuse comme l’avait fait avant eux, face à la même problématique, en 1862 leurs prédécesseurs. Mais l’investigation en resta là jusqu’à cette date du 2 novembre où de ce fait la profanation par imprévoyance, secondaire au défaut de considération – des lieux de mémoire et d’identité et des gens … vivants ceux-là – devenait inévitable.
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Ce jour là, les travaux étaient exécutés sous maîtrise d’ouvrage municipale, l’entreprise Geneste étant prestataire principal et l’entreprise Pourreyron (TP) intervenant en sous-traitant pour le compte de l’entreprise Geneste.
C’est pourquoi n’étant pas en droit de juger nous-mêmes et faisant totalement confiance à la justice pour le faire notre plainte ne désigne nommément personne et a été portée contre X par Maître Gilles Jean-Portejoie auprès de Monsieur le Procureur de la République qui s’est adressé à la Gendarmerie de Romagnat pour entendre une première fois l’ensemble des parties.
PROFANATION : LES FAITS ET LEURS ATTENDUS.
Connaissant l’engagement de l’association Romagnat-Patrimoine, dont je suis président, dans le conflit provoqué par la décision de la municipalité de Romagnat de détruire le calvaire-ossuaire, Monsieur Georget Gasse (domicilié au 38 rue de la Treille) ayant découvert alors qu’il partait acheter son pain, la présence sur le tertre de l’ossuaire – alors qu’aucune information n’en avait été donné*- d’une pelle mécanique qui avait commencé à défoncer la motte faisant apparaître à chaque « pelletée » une très grande quantité d’os, tint à m’en informer immédiatement par téléphone à mon cabinet. Il était 8h 30 ce lundi 2 Novembre Jour des morts dans les pays de tradition chrétienne.
Le temps de réaménager mon emploi du temps de la matinée et je me suis retrouvé à 9 heures sur le site. Monsieur Jacques Fluck (13 rue du cimetière) agriculteur à la retraite y était présent, « arrêté », en se rendant à sa grange plus loin rue de la treille, par le même « spectacle » que celui dont avait été témoin Monsieur Gasse et de son propre aveu, lui qui n’avait pas douté un seul instant qu’il y ait là l’ossuaire de Romagnat avait été surpris malgré tout de la très grande quantité d’os que la pelle mécanique mettait au jour. Trois camions 6 roues étaient sur le site et avaient commencé leur rotation pour assurer l’évacuation de la motte Le gabarit des camions excluait bien évidement tout transport au cimetière comme on avait voulu le faire accroire. Face à cette évidence et très touché par le « commerce » qui était ainsi fait de restes humains, Jacques Fluck interpella Monsieur Michel Joachin conseiller délégué aux travaux, présent pour l’ouverture du chantier **, pour lui demander où partaient les camions dont le chargement était constitué indifféremment d’ossements* et de leur substrat terreux, le plongeant manifestement dans un embarras dont il tenta de se dépêtrer en disant malgré l’invraisemblance que c’était au cimetière …malgré tout très « embarrassé » et pas convaincu d’être crédible il tourna les talons abandonnant sa position certainement plus tôt que prévu laissant Jacques Fluck seul en face du patron de l’entreprise de TP Pourreyron (13 rue des acacias Beaumont) travaillant en sous-traitance de l’entreprise Geneste pour cette opération de purge. Monsieur Fluck posa alors la même question à Monsieur Jean Pourreyron qui lui dit que les camions partaient décharger dans une gravière à Pont-du Château … Depuis aux dires du même ce serait à Puy Long que les chargements auraient été acheminés … quel intérêt y avait il – on exclut a priori dans cette affaire celui de la vérité ? – à corriger a posteriori la destination ? Problème réglementaire, brouiller les pistes et sous la pression de qui ? Bref on ne saura pas combien de camions étaient partis depuis l’ouverture du chantier, deux ou trois ? Combien de volume donc - mais déjà pas mal en tout cas - et combien de restes humains dans une décharge à ordures ? Par contre on ne peut que constater l’impréparation de cette opération malgré l’extrême sensibilité du dossier, dont le but évident n’était que de se débarrasser au plus vite de cet encombrant ossuaire sans laisser de trace car c’est bien d’un problème de traçabilité où d’intraçabilité - comme on préfère – presque de dissimulation, auquel par défaut la mémoire est confrontée …et constater ainsi le mépris réaffirmé à l’égard de ceux qui étaient touchés par cette opération – à caractère d’épuration – et qui depuis le début c’est-à-dire sa décision non concertée, l’avaient fait savoir.
C’est sur ces entre-faits que j’arrive sur le site où Jacques Fluck en présence de Monsieur Pourreyron me rapporte ce qui précède et dont, la droiture de Monsieur Fluck étant connue de tous, je n’ai aucune raison de douter, d’autant plus que Monsieur Pourreyron est présent à ce moment là avec nous et que les gros camions six roues ont commencé à changer de destination pour se rendre à proximité de Saulzet le chaud décharger (photo) dans une parcelle appartenant à Monsieur Fluck qui dans une optique conservatoire la proposé à l’entrepreneur qui y a tout de suite vu son intérêt, Saulzet le chaud étant à une distance bien moindre que la décharge de Puy Long ou la gravière de Pont du château. Ainsi donc l’entreprise de déblaiement avait toute latitude pour faire de l’ossuaire « à peu près » ce qu’elle voulait témoignant ainsi s’il était encore nécessaire de l’incroyable désinvolture dont la municipalité a pu faire preuve dans cette affaire qui divisait (et continue à le faire encore plus profondément) la communauté romagnatoise.
J’écris « à peu près » car 2 ou 3 mètres cubes devaient être soustraits de l’ensemble des 350 m3 de l’ossuaire et échapper à la ronde infernale pour servir le simulacre au transfert vers le futur ossuaire du cimetière des Palles. Ils l’ont été par l’entremise d’un petit camion blanc de l’entreprise Geneste (photo) dont ce sera de toute la journée l’unique transport. Hormis la venue éclair d’un cadre de cette entreprise vers 13 heures afin de faire de moi des photos sur le chantier déserté - qui n’était pas clos (10)*- ce camion et son chauffeur furent ce jour là la seule présence de l’entreprise Geneste qui était pourtant l’entreprise à qui avait été attribué par la mairie le marché pour la destruction du calvaire-ossuaire et qui ce jour là avait confié en sous-traitance le terrassement final, à la société Pourreyron. Ainsi était battu en brèche l’argument du Maire François Farret qui au terme du conseil municipal du 6/10/2010 en réponse à ceux qui s’inquiétaient du devenir des restes humains qu’il reconnaissait ce jour là pour la première fois du bout des lèvres – « oui on a découvert quelques ossements » - avait dit qu’il était de la responsabilité de l’entreprise qui démolissait de relever chaque jour les os, de les mettre dans des sacs en plastique et de les emmener au cimetière ! Ce 2 Novembre fut donc « un jour sans » et alors que des centaines et des centaines d’ossements furent ramenés au jour par la pelleteuse il n’y avait pas une seule personne pour assister le chauffeur de la pelleteuse et relever les os au fur et à mesure qu’ils apparaissaient ; les mettre au fur et à mesure dans les fameux sacs en plastique et les emmener ensuite au cimetière pour, suivant le choix obligataire proposé par la loi, être inhumés et si ils étaient jugés trop nombreux être pour partie brulés. Ceci ne s’étant pas passé ainsi, la municipalité ayant opté pour le « laisser faire » par les entreprises pour se débarrasser des restes humains dans des décharges publiques ou privées au mépris des obligations légales nous a fait d’emblée l’impression ? que nous étions en face d’une profanation.
On notera que contrairement à ce qui avait été le cas le jour de la dépose de la croix aucun grand élu, Maire et adjoint à l’urbanisme ou autre adjoint pas plus que la police municipale ne furent présents, ne serait-ce qu’un instant ce jour là sur le site au contraire du jour de la dépose de la croix où ils furent là toute la durée de l’opération de 8 heures à 14 heures aux dires de Jean Chauchard le sculpteur présent pour le déplacement de son œuvre et confirmé en cela par des riverains Alain Cournol et Georget Gasse (photo). Le photographe de la municipalité était également présent à ce moment là sur le chantier et des clichés doivent être disponibles de cette dépose alors qu’aucun, outre les nôtres, n’a été pris de la purge de l’ossuaire par les services municipaux. Ceci montre bien, l’absence totale de considération dont la municipalité a fait montre à l’égard du site et ce à quoi se réduisait sa vision de cet ensemble calvaire-ossuaire- dont aucun inventaire complet et concerté sur lequel aurait pu se faire un accord n’a jamais été fait (voir le nôtre) à sa partie la plus visible et la plus symbolique ce qui pourrait se comprendre de la part de gens dont on sait l’attachement à la symbolique mais à laquelle malgré tout ne saurait se réduire le réel signifiant dont tant d’autres suite à leur initiative ont eu à souffrir et souffrent encore ! « Confessant « de fait ce penchant pour l’ordre symbolique le Maire finira par admettre dans le bulletin municipal n°73 de Décembre 2010 (paru après les événements !?) que le transfert des restes humains découverts rue de le Treille ne fut que symbolique ! Disant ceci, il ne semble pas réaliser que si ce n’est qu’un prélèvement qui a été effectué et transféré – fut-il significatif ce qui est tout sauf certain (12)- « le reste » et Dieu sait s’il est important est parti où ? C’est la question à laquelle ils devront répondre, en tout cas, nous l’avons vu plus haut, selon les dispositions légales. Pour notre part et afin d’avoir cette réponse nous avons demandé dès le 2 novembre au soir à Maître Anthony Chaplais Huissier de Justice, de venir constater sur les deux sites de La Treille et de Saulzet le Chaud ce qui était visible. C’est le 3, à la première heure, qu’il constata rue de la Treille la présence de nombreux ossements abandonnés après la purge de la veille, contrairement à la procédure de conservation indiquée par le Maire et sur le site de Saulzet de très nombreux restes humains affleurant des 300 mètres cubes déposés là par l’entreprise Pourreyron suite à la proposition de Jacques Fluck. (Procès verbal à disposition). Parallèlement j’ai tenu à aller prévenir la gendarmerie de Romagnat et j’ai immédiatement fait un courrier au Préfet (LRAR) afin de l’alerter (courrier disponible).
Enfin, Alain Cournol, Laurence Gauffier-Seguin, Michel Cournol, Thibaut Biscos-Perriand et Laurent Ollier peuvent également témoigner d’un moment ou d’un autre de cet épisode ou d’indices qui l’ont précédé ou lui ont succédé ainsi que tous ceux qui ont participé à la marche de la mémoire le 2 décembre.
Outre Maître Chaplais ; le journaliste de Clermont 1ère est venu sur les sites très peu de temps après la profanation.
Le déni de l’ossuaire quels que soient les « réaménagements langagiers », toujours après coup, (voir presse et particulièrement TV) auxquels le Maire a eu recours pour tenter de se tirer d’affaire avait rendu cette profanation inévitable pour ne pas dire préméditée. L’arrêté des travaux (voir photo) qui à côté de l’énumération de la croix et de la piéta au titre du « démantèlement » du calvaire ne porte pas mention de l’ossuaire est loin d’être anecdotique à cet égard, et en plus le calendrier qui figure dessus allant jusqu’au 26 Novembre montre bien qu’il y aurait eu moyen d’éviter la très fâcheuse date du 2 Novembre jour des morts pour « l’exécution » de cette basse besogne devenue mauvaise action pouvant apparaître comme une provocation. Il n’y avait pas d’urgence … la preuve aujourd’hui : rien n’a changé et le chantier est dans le même état que celui dans lequel il était au soir du 2 novembre 2010.
On le redit le choix de cette date est pour nous un facteur aggravant (voire fondateur de la profanation !) si elle l’a été délibérément, c’est une faute éthique, si elle l’a été par incurie et /ou manque de vigilance c’est manquement à la fonction de Maire.
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1: dès lors que la croix fut déposée le chantier cessa d’être clos de manière totale signe que pour eux la croix déplacée « la messe était dite »… l’ossuaire, dénié de fait, c’était au mieux pour l’anecdote … mais quand cette anecdote eut mal tourné après la purge (entraînant de nouvelles personnes dans la réprobation véhémente) c’est là que la clôture fut renforcée … et les panneaux doublés (photo)
2 : Dans le bulletin municipal (n° 73 Décembre 2010) croyant apporter encore plus de crédit à l’option du transfert symbolique le Maire, avance la précision que le prélèvement a été fait dans « la partie centrale située sous la croix » … or c’est vraiment le seul endroit de la motte où il n’y avait pas d’ossements ! Tout le monde comprendra en effet qu’on n’avait pas assis l’importante croix du calvaire et son piédestal sur un socle aussi friable que celui qui aurait été constitué d’ossements. Par ailleurs le prélèvement a été effectué vers 9h30 le matin (photo des camions) alors que l’entame des travaux n’en était qu’à la partie du tertre situé à l’angle de l’allée André Guinard et la rue de la Treille là où le petit if venait d’être arraché. Ce n’est qu’à la toute fin du chantier (environ 15 h) que fut approché la partie centrale (après que tout le pourtour eut été évacué), le massif de maçonnerie sur lequel reposait la croix et autour duquel furent amoncelés les autres gravats issus de la destruction du mur de clôture comme on peut les voir encore aujourd’hui mercredi 26 Janvier (Photo disponible).
Jean-Noël Macias (46 rue de la treille) qui en début d’après-midi a passé un moment en ma compagnie sur le site et pris des photos peut témoigner de cette réalité.
C’est donc un important massif de maçonnerie qui supportait l’ensemble croix et piédestal du calvaire pour les mêmes raisons que celles qui ont amené l’entreprise Geneste à réaliser un dais ferraillé de plus de 5 ou 6 mètres cube de béton (photo disponible) sur l’ancienne décharge de Puy Blanc dans l’attente de recevoir la croix du calvaire seul élément déplacé pour l’instant : quid de la piéta, quid de l’enclos … sans parler de l’ossuaire !
Cette outrance langagière du premier magistrat de la ville et officier de police judiciaire de facto -portant sur ce point du transfert symbolique - donne une illustration parfaite et plus générale de la désinformation qui a entouré cette affaire demeurée totalement opaque jusqu’au bulletin n° 73, toute l’information - fut-elle contradictoire comme l’exige l’éthique journalistique - le fut jusque là à notre seule initiative.