Petite histoire critique d'élections municipales.
L'ailleurs n'étant jamais si loin de l'ici-même, allons donc pour commencer faire un tour "du côté d'ailleurs" comme disait Pierre Dac et plus précisément à Cournon en 1983…
Ici comme ailleurs en cette année là, vont avoir lieu des élections municipales et la liste du PS - qui comprends des gens désormais connus comme Catherine Guy-Quint, ou Bernard Pasciuto qui seront plus tard successivement maires de Cournon et conseillère européenne et conseiller général- est menées par un encore jeune militant syndical- qui lorsqu'on enquête aujourd'hui n'a semble-t-il laissé aucun souvenir- aux allures de prophète qui, déjà avec ses crocs, a dû, s'accrocher à la tête de liste et qui porte nom : Jean-François Sauvadet.
Les élections passent, et le train du PS également : Jean-François Sauvadet est battu .On notera pour mémoire que c'était la première fois, et ce jusqu'à encore aujourd'hui que JF.Sauvadet se présentait en tête au suffrage universel – notons qu'il n'est pas le seul dans ce cas on connaît tous ces autres prétendants-suceurs de roues qui se voudraient héritiers légitimes que sont Brice Hortefeux ou Gilles-Jean Portejoie et faut-il rappeler qu'en temps que maire de Romagnat JFS, ne fut que simplement coopté au cours du dernier mandat le 6 février 2006, tout comme l'avait été son prédécesseur Bernard Brajon la première fois, avant que par la suite il n'ait découragé tout le monde y compris ses opposants et ce pour un quart de siècle, ce que nous verrons par la suite… quoi qu'il en soit il semblerait que la cooptationtienne lieu de régle de succession- certes non héréditaire- dans la dynastie romagnatoise. A propos de cette période, quand à force de stigmatiser les autres prétendants à propos de leur manque d'expérience il les pousse enfin à être interrogé sur la sienne, J.F Sauvadet répond tout d'abord en mettant en avant ce haut fait d'armesque fût Cournon83 précisant toutefois qu'il a perdu mais semblant établir un lien de cause à effet avec le fait que la fois d'après (conduit par Catherine Guy-Quint ) ils aient gagné , omettant de préciser qu'en ces circonstances lui n'était plus là ayant très tôt compris après ce désastre, qu'ici - à Cournon - les carottes pour lui étaient bien cuites, évidence que s'il n'avait pas comprise - Jean-François a du mal avec les évidences… c'est le propre de l'entêté- ses camarades eurent tôt fait de le convaincre… alors JF Sauvadet comme on l'eut fait sous la 3ème République alla chercher une nouvelle "terre d'élection" et ainsi après moults calculs - il évoque d'autres raisons qui peuvent avoir eu aussi une importance, mais sa pugnacité politique permet d'établir le juste rapport des priorités… - jettera son dévolu sur Romagnat .
Partis du "côté d'ailleurs" et en Cie de JFS nous voilà donc arrivé maintenant, comme convenu : "ici-même" à Romagnat où nous débarquons également en 1983, tout juste avant les élections municipales donc. Arsène Boulay est un maire issu de la libération (août 1944 ) on réalise ainsi qu'à ce moment là il y a presque 40 ans qu'avec bonhommie , intelligence et le souci de rassembler (paradoxalement la guerre n'est pas si loin !) il règne à sa manière sur lacommune de Romagnat. Lui l'enfant du Crest s'est retrouvé à Romagnat peut-être parce que son beau-père Antoine Villedieu député avait un petit "mazet" à Clémensat. Aussi c'est tout à son honneur qu'après un aussi long bail il annonce son intention de passer la main à la mairieet ce sans doute à un homme sur lequel il puisse exercer une certaine influence car si notre homme se retire de Romagnat il n'en demeure pas moins conseiller général et député, et avec sans doute la peur du vide du à son départ sur l'air lancinant de "que ferez-vous sans moi ?" (ce sont les grandes années Ferrat !) cohabite la crainte qu'une "autre" conduite municipale (c'est la grande époque d'une "autre politique "!) fut-elle de gauche, enfin pas trop ! pourrait de fait, désavouer ce qui jusque là avait tenu lieu ici de politique , et faire désordre, d'autant plus que notre "ingénieur des ponts" (c'est l'époque ou on ne disait plus "agent voyer ") était sans doutedavantage un homme de la relation social qu'un visionnaire en matière d'urbanisme. Mais sans doute Arséne Boulay n'avait-il pas totalement conscience de combien "le monde" avait changé, la commune en premier, qui était passée de 1320 habitants en 44 , à + de 7000 en 83 - la chose n'ayant qu'un très loin rapport avec une dynamique communale délibérée (toute les communes du même type étaient dans la même situation ) ni des qualités urbanistiques manifestes quant aux services ils avaient plutôt suivis que précédés et l'incapacité d' imaginerun centre était déjà manifeste appuyée sur un parti-pris qui se pensait "moderne". Mais surtout les villages avaient cessé d'être à l'écart de la sociéte en générale, et politiquement, le congrès d'Epinay (1974) et son corollaire " l'union de la gauche " (1981) étaient passés par là etpassé à la trappe de fait le traditionnel consensus villageois local… avec sans doute déjà comme une nostalgie, porté comme une bannière le ridicule slogan "une ville à la campagne " qui a creusée l'ornière encore actuelle du "village à l'écart de la ville" . Cet écart de ville je l'évoquerai un autre jour sous l'intitulé de" la ville introuvable".
Mais c'est surtout à l'intérieur de la gauche que le ver était dans le fruit, et que les vieux cadres tendance SFIO allaient se faire secouer – ça avait déjà passablement secoué ici en 1977 - par ces nouveaux invités au "banquet" de ce qui était en fait "l'union des gauches" et dont depuis, celles-ci – à de rares embellies près - ne se sont jamais vraiment remises.
Enfin cette situation nouvelle allait entraîner un ordre nouveau : la droite localement allait devoir se nommer ce qu'elle fit avec un candidat de valeur, comme la suite le montrera : Jean Poitrineau, et la gauche désigner un successeur à Arséne Boulay. Ce dernier n'avait sans doute pas pu imaginer que l'élu de la section local puisse être quelqu'un d'autre que son dauphin désigné, Bernard Brajon et pourtant contre toute attente ce fut la liste de Paul Malet , conseiller municipal depuis deux mandats déjà, ayant sans doute fait un tour dans le temps par le PSU, qui sorti des urnes…
Il sembla un moment que la règle de la démocratie fut acceptée par tous même si sans doute ils étaient nombreux à penser que l'on est "jamais trahi que par les siens"… bonne raison que quelques jours suffirent pour que fort de cette légitimité que confère l'habitude et la notabilité ils trahirent à leur tour la règle, à savoir la démocratie elle même… Un mystérieux appel émanant du bureau fédéral demandant alors à Arsène de remettre dans l'ordre dans tout ça ce qu'il fit en se reconduisant à la tête d'une liste constitué des mêmes qu'avant et qui n'accordait qu'une place à celle de Malet à savoir la "seule sienne"… et le bureau fédéral entérina et Malet du coup "fera des siennes" avec une autre liste dont je serai le second, non pas que ce soit là, ni mes origines ni mes oignons mais dans cette affaire j'étais parti bien avant les autres sur une idée de liste à parti pris environnementaliste et qu'à un moment il avait bien fallu que je me case : alliance objective comme aurait dit l'autre!… Mon expérience électorale s'arrêtera là… à tout jamais je crois !
Boulay avec 1393 suffrages fut mis en ballotage au premier tour, la liste Poitrineau recueillant 1190 voix et celle de Malet qui se retirera pour le deuxième tour 560 bulletins : sortez les calculettes ! Ce succès relatif ne réussira toutefois pas à effacer ce qui pour un vétéran de ce combat, reste un déni de démocratie fleurant bon un "péché originel"… dont la pénitence sera un interminable bail de 25 ans de médiocratie dont il m'apparaît à cet instant comme presque impossible d'en sortir quelques lignes tant la chose fut sans relief à l'exception des accents courroucés et rocailleux d'un Jean Malacan qui sont ceux qu'on acquiert à force d'avaler des couleuvres et la tendance méfiante autoritaire et coléreuse du premier magistrat comme autre versant d'une pratique lénifiante de la chose publique capable de tarir toute velléité citoyenne à tel point que pendant ce quart de siècle l'opposition elle-même a disparue, victime elle aussi de cette étrange et décourageante impression qu'il n'y aurait ici rien à faire hormis la nuit dormir et peut-être l'été sortir le barbecue… presque à reprendre cette formule, appliqué en l'occurrence ici au suburbain, du commissaire au tourisme Bernard Grosleau à propos du tourisme rural : "là où on s'emmerde le jour et où on a peur la nuit ! "
Certes il se fit ici tout ce temps, tout ou presque de ce qui se fit ailleurs mais sans talent, sans anticipation, sans personnalité de sorte qu'à "la sortie" il traine sur ce semblant de ville comme une langueur qui fait que pas grand monde ne sait trop où il habite touché par une profonde crise de représentation aucun propos identitaire n'ayant jamais été tenu pas plus qu'était développé venant faire équilibre un propos communautaire dans lequel s'inscrivent l'urbanité nouvelle de ces lieux en mutation .
Essayons tout de même d'en dire pour l'instant un peu plus !
En 1985 comme prévisible donc Arséne Boulay démissionne et tout aussi prévisiblement Bernard Brajon est élu par le conseil municipal d'une voix (c'est pas beau la démocratie ?) sur Jean Malacan, traditionnel opposant dans ces circonstances , et à qui on va chercher des raisons de cet échec enfin si prés du but (on mégote pas ici, 2 ans après 83, sur ce qui pourrait faire accroire à la démocratie !) : Dans ce haut lieu républicain laïc et passablement maçonnique, lui, Jean le chrétien de gauche aurait payé au prix fort l'obligation faite par François Mitterand à toute les municipalités de France de contribuer aux budget des écoles privées, ou alors Jean ne serait qu'un improbable encarté au PS (reproche qui lui fut encore fait dans sa confrontation avec Sauvadet en 2005 pour la succession de Brajon), ou encore il y aurait eu incompatibilité entre la fonction de maire et sa position professionnelle aux impôts… Pourquoi se serait-il présenté alors ? Balivernes tout ça pour brouiller les pistes, Brajon devait être élu puisque tel était le choix du prince ! On ne pourra constater que longtemps après que ce n'est peut-être pas un cadeau qui en la circonstance lui fût fait car la tâche était peut-être trop considérable et même dans un contexte ou aucune difficulté particuliére ne vint compliquer son parcours l'homme s'y épuisera à la longue… ainsi fait des fois l'usure impitoyable du pouvoir !
Bernard Brajon était issu du FLEP (Foyer laïc d'éducation populaire) structure monolithique typique des mouvements de jeunesse de l'après-guerre pour la diffusion de la culture et des loisirs pour tous affilié à la très puissante FOL (Fédération des Œuvres laïques) devenue FAL depuis. La chose est organisée en sections chapeautées par un conseil d'administration par un président. Quand Bernard Brajon en devient président, de mémoire de tous il avait bien l'intention de faire de sa présidence (présidence qu'il abandonna en 1977 lorsqu'il devint pour la première fois conseiller municipal) quelque chose - et l'on vient de voir qu'elle le fera un jour maire – et du foyer une forme de service municipal délégué qui va gérer toutes – ou presque - les activités socio-culturelles, peut-être dans les premiers temps du premier mandat de Bernard Brajon, pour les contrôler, mais par la suite parce que ça apparaît de fait comme la gestion la plus simple , règle d'or de ces municipalités successives, méthode qui assurément à la longue en plus de développer l'assistance finit par décourager toute initiative particulière…serait ce vraiment une boutade que de prétendre qu'un citoyen de cet commune porteur d'un projet culturel singulier et qui voudrait prétendre légitimement à une aide auprès de la mairie se verrait demander en préalable s'il a pris contact avec le Foyer ? Que dire alors à propos de celui qui sur ce territoire mènerait une action culturelle sans solliciter d'aide ? Rien si ce n'est qu'il n' existe pas !
Gestion simple, avec en outre le désir de ne pas mécontenter son cœur de cible électorale (classe moyenne norm. et sup trouvant là de nombreux avantages) et manque de curiosité à l'égard de ce territoire et de ce qui se passe à l'écart de la sphère institutionnelle voilà bien deux marques de ces équipes municipales sans oublier "l'effet entonnoir" qui comme on vient de le voir s'applique aux activités socio-culturelles sur le mode ancien du centralisme bureaucratique "allégé" mais aussi aux sports (l'aspect politique en moins, on sait les sportifs y seraient moins sensibles, mais à l'ordre tout autant…) qu'à l'urbanisme, mais là c'est une autre histoire sur laquelle nous reviendrons ultérieurement .
Se passa-t-il donc un quart de siècle ici sans qu'il ne se fit rien ? Bien sûr que non , en retard souvent et sans vision d'ensemble il se fit la même chose qu'ailleurs sans dissiper toutefois cette impression d'être ici de nul part, de vivre, enfin plutôt d'habiter dans une cité-dortoir ! Les même chose qu'ailleurs mais sans réflexion personnelle, sans personnalité, sans talent. Il n'est qu'a considérer l'architecture publique qui a tout de même engagée des budgets considérables pour produire des bâtiments anecdotiques je veux dire qui n'ont d'autres qualités que d'être vu, de se montrer comme on dirait d'un enfant voulant faire l'intéressant . Quel lien faire avec le fait que les architectes ait été francs-maçons aucun peut-être si ce n'est le goût exacerbé pour le symbolisme qui tend si souvent à la caricature didactique .
Dire que ces structures ne remplissent pas leur fonction première serait excessif, mais elles ne remplissent pas celles qui devraient être inhérentes à toute intervention publique servir aussi à la réflexion et à l'éducation à la beauté du citoyen et à ce surcroît de citoyenneté qui consiste à se trouver bien là où l'on est et pourquoi pas l'écrire à s'y trouver mieux qu'ailleurs pour vivre au quotidien !
On l'aura compris mais surtout ils sont très très nombreux à le ressentir depuis bien longtemps un changement profond est ici nécessaire, une relance indispensable, une relation nouvelle entre les romagnatoise et romagnatois constitue une attente profonde, dans l'inconscient collectif le rétablissement du "lien au lieu" est chose essentielle, en même tant que le sentiment de participer à l'avènement d'un corps social qui dépasse le cadre communal dans lequel toutefois la "construction" d'une communauté ouverte et profonde est un souhait chez la plupart des "gens d'ici".
Alors que 2008 nous aide à le réaliser.
En cette année électorales, les Romagnatois ont-ils les candidats susceptibles de servir avec l'attention , l'humilité et l'éfficacité indispensables de servir leurs désirs ?
Le billet suivant que je confierai à ce blog "Parole Libre" examinera de mon point de vue cette question au regard des personnes qui se présentent, des analogies évidentes avec la situation de 83 et les moyens de réparer la fâcheuse situation qu'elle a installée, mais aussi des choses radicalement nouvelles .
A ceux qui me liront un grand merci, à ceux qui me confieront leurs commentaires… et bien… de même !
Bernard Quinsat